Ce reportage a le mérite de mettre en avant la naissance à domicile sous un angle plus tendre que d’habitude. Certes, il n’est pas virulent, mais quelques sous-entendus ou fausses affirmations me donnent envie de réagir ...
David Pujadas : La santé, maintenant, avec l'essor en France d'une pratique venue d'Europe du Nord : l'accouchement à domicile. Dans sa chambre, ou même, vous allez le découvrir ... dans son jardin ! c’est plus intime ... c'est moins médicalisé. Quelques 70 sages-femmes aujourd'hui en France assistent ces futures mamans à domicile. Et elles se disent très sollicitées. Quelles motivations mais quels risques aussi, (dossier signé Perrine Bonnet, Antoine Hussert)
Voix off : Les voisins de cette résidence ne s’en doutent pas mais au 2e étage, dans le secret de cette chambre à coucher, un matin de juillet, une petite fille est née.
Delphine Massoni : Quand c’est devenu vraiment intense, naturellement, c’est la chance que j’ai eue, de ne pas avoir de position imposée, naturellement je me suis accroupie au pied de mon lit et voilà elle est arrivée facilement sous les yeux bienveillants de ma sage-femme.
Voix off : Accoucher chez elle n’était pas un accident mais un choix. Immortalisé par un photographe, heure par heure.
Son site : www.denisdalmasso.com
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Delphine Massoni : La sage-femme contrôlait régulièrement le rythme cardiaque du bébé. Elle avait les yeux rivés sur moi. (on voit une photo) Là ça commence à devenir un petit plus intense. Mon mari a eu des courbatures le lendemain parce que j’étais vraiment suspendue à lui. Je me suis accroupie, là, pour qu’elle puisse sortir et j’ai eue la chance de pouvoir l’attraper (on voit une autre photo des premiers instants, puis une autre) Cette photo c’est, toujours un bouleversement pour moi de la voir (on voit une photo magnifique : la maman si fière et heureuse).
Voix off : Trois heures d’efforts sans péridurale. Elle garde pourtant de cet accouchement un meilleur souvenir que les deux précédents à l’hôpital, même s’ils se sont bien déroulés.
Delphine Massoni : Moi ce n’était pas du tout en réparation d’un accouchement qui se serait mal passé. Ils se sont bien passés mais c’est vrai que pour moi le dernier a été, je pense, le meilleur.
Voix off : Aujourd’hui Madeleine est une petite fille en pleine forme. Mais Delphine doit encore justifier le choix de sa mise au monde, qui en a choqué plus d’un.
Delphine Massoni : Il est fait en toute conscience et puis ce n’est pas illégal. On a le droit de disposer de son corps. Moi c’était vraiment ça, je voulais pouvoir accoucher comme je l’entendais, et malheureusement c’était pas possible en structure.
Voix off : Les associations avancent le chiffre de 3000 naissances à domicile par an. Mais les statistiques officielles n’existent pas. Impossible de savoir combien de bébés naissent dans l’intimité d’une chambre, ou comme dans la famille Pelletier ... au pied d’un arbre. Le petit Noé devait naître sur le lit de ses parents le 19 août dernier, mais il y faisait trop chaud, alors ça s’est passé ...
Mathilde Pelletier : ... sur le petit matelas (la caméra montre le lieu reconstitué pour l’occasion). Donc d’abord j’étais accrochée au papa, Olivier, par les épaules, et puis au final je me suis mise sur le dos et il est arrivé très vite (le sourire de cette maman en dit long sur l’émotion qu’elle ressent encore à cette évocation)
Voix off : Pour ces parents, le cocon de la maison, c’est nettement plus rassurant.
Olivier Pelletier : Y’a pas tout le médical autour, les éclairages au néon, les bruits des machines, tout ça. On est tranquilles, quoi.
Voix off : A contrario, ça ça vous fait peur ?
Mathilde Pelletier : Oui, très peur. Parce que je me dis aussi que elles (les sages-femmes) ont beaucoup plus de travail, tandis que là Gaëlle était vraiment disponible pour nous.
Voix off : Gaëlle Mahec c’est l’une des 60 sages-femmes qui acceptent d’accompagner les accouchements à domicile. Sans assurance. Car les compagnies refusent de couvrir ce risque, pourtant limités d’après elle.
Sophie Gamelin : Le présentateur nous parlait de 70 au début ... Il aurait été bien de s’entendre sur les chiffres pour la cohérence du reportage.
Gaëlle Mahec : Je n’attends pas que les choses aillent mal. On prend vraiment toutes les précautions : j’écoute le bébé, je regarde comment le travail avance. Y’a tout un tas de petits signes, comme ça, qui nous disent que tout va bien. Ou que si y’a un petit signe qui met un doute, eh bien on laisse pas le doute et on va à l’hôpital.
Voix off : Les Pelletier avaient bien ouvert un dossier dans une maternité. Mais à 20 kilomètres de chez eux. Une prise de risque, assumée à 100% par le couple. Mais qui fait frémir les gynécologues hospitaliers.
Sophie Gamelin : En quelques secondes, le reportage nous transporte en mélodrame : être à 20 kilomètres d’un hôpital reste raisonnable. Ce n’est pas en soi une *prise de risque* car le temps nécessaire pour s’y rendre en cas de transfert est alors rapide. Ensuite on le sait, tous les médecins hospitaliers ne sont pas favorables à l’accouchement à domicile. Pourtant cela ne les fait pas *tous* frémir : en effet, certains praticiens soutiennent les projets de parents et sont prêts à ouvrir les plateaux techniques.
Pr Bruno Carbonne (gynécologue à l’hôpital Trousseau AP-HP) : Certains pays sont organisés pour ça, y’a des réseaux spécifiques, c’est le cas de la Hollande par exemple ou de certains réseaux en Grande-Bretagne, en France on n’est pas du tout organisés pour ça, on n’en a pas l’habitude. Et quelquefois les transferts, pour des raisons géographiques, peuvent être plus complexes ou plus longs. Donc ça n’est pas une garantie totale de sécurité.
Sophie Gamelin : Cher professeur, j’ai envie de dire que l’hôpital n’est pas davantage une garantie totale de sécurité ! Ensuite les raisons géographiques que vous évoquez concernent avant tout l’hôpital, ce dans une proportion plus importante puisque la majorité des femmes accouchent en structure et que certaines sont géographiquement éloignées du lieu de résidence des parents, qui doivent faire plus de 45 minutes de trajet. Malgré tout cela concerne peu de régions.
Le transfert, s’il est nécessaire, peut très bien se faire avec la voiture de la sage-femme ou du couple. Et puis, qu'est-ce qu'apportent les pompiers ou l’ambulance ? Le véhicule ou l’uniforme n’est pas en soi un gage de sécurité (sans compter que la sage-femme, professionnelle médicale, peut gérer l’urgence). Enfin, un accident n'arrive pas *comme ça* et la sage-femme du reportage le souligne très bien. D’autre part, à l'hôpital il faut bien 30 minutes pour préparer un bloc... du coup les peurs qui sont générées par les clichés sont caduques : la *sécurité*, si chère au reporters, journalistes et hospitaliers est ailleurs (pratiques médicales, respect de la physiologie, bien être de la femme etc. la liste est longue).